GILLET MAURICE

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Le Bois le Prêtre :

Un ravin au fond duquel jaillit une source, la fontaine du Père Hilarion entaille la forêt. A l'Ouest , s'élève une hauteur, cotée 372 dont l'éperon dépasse la lisière de la forêt. La Croix des Carmes en marque le sommet . C'est la conquête de ce saillant Ouest , point d'appui et observatoire d'artil--lerie , qui a été notre objectif final .-Dès le 30 septembre (1914), nous prenons pied aux lisières Sus-ouest de la forêt. Le 29 octobre un poste allemand est est enlevé au saillant Sud-Est  - Des combats s'engagent qui se termineront par l'occupation de toutes les lisières méridionales de la forêt. L'infanterie fait des progrès journaliers. Devant elle , les petits postes ennemis lâchent pied. On amène de nuit des canons jusqu'aux tranchées en ayant soin de ne pas dévoiler leur présence avant l'heure de l'attaque. Les sapeurs du Génie font sauter avec des pétards de mélinite
les défenses accessoires. puis soudain le canon tire à obus explosifs à bout portant (parfois à moins de 100mètres) sur les blochaus et les mitrailleuses de flanquement. L'ennemi cède devant les baïonnettes  de nos fantassins et lorsqu'il veut contre-attaquer, le canon l'arrête par un tir d'obus à mitraille. tels furent en décembre, sous la neige et la pluie, les combats du Père  Hilarion. Un brigadier d'artillerie blessé mortellement au cours de ces actions répondit aux paroles d'encouragement de son Lieutenant: "Cela ne me fait rien, puisqu'on a fait du bon travail." A partir de janvier, il s'agit de s'emparer de la hauteur de la Croix des Carmes. On ne progresse que de 100 mètres par  100 mètres et sur les pentes du mamelon, il faut enlever suc--cessivement quatre lignes de tranchées profondes hérissées de défenses accessoires et flanquées par des mitrailleuses. Les premières attaques ont lieu le 17 janvier (1915) . Elles nous donnent 450 mètres de tranchées un mois après, le 15 février, une seconde ligne tombe entre nos mains. Le 28, nous prenons un blockaus. A partir de ce moment, l'ennemi réagit avec violence.
il nous lance des torpilles aériennes et nous bom- -barde à coup de grenades à main. Du 1er au 5 mars, il déclenche d'incessantes contre-attaques qui échouent. Le 15 mars, il fait exploser une série de fourneaux de mine sous nos tranchées, réussit à y prendre pied, mais ne peut s'y maintenir. Au soir, nos fantassins sont réinstallés dans les tranchées complètement bouleversées. Le 30 mars, au matin nous attaquons et enlevons une troisième ligne de tranchées. Les allemands nous contre-attaquent et laissent entre nos mains 140 prisonniers, dont 3 officiers. L'on combat pendant la première quinzaine d'avril sous les rafales de pluie et de neige d'une façon continue. Un mouve- ment de flux et de reflux entraîne et ramène nos hommes. On se bat dans les boyaux, derrière les barrages à coup de grenades et les deux artilleries couvrent cet étroit espace de terrain de

projectiles qui fauchent les arbres, ébrèchent les parapets , comblent les boyaux. le dernier effort est donné en mai. Nos soldats sont impatients d'attaquer. les conscrits de la classe 1915 sont les plus ardents. Ils savent qu'on se prépare et chaque jour ils demandent à leurs officiers: "Quand est-ce qu' on va charger à la baïonnette ?" L'attaque a lieu le 12 mai et nous rend maître des blockaus. Nous sommes aujourd'hui au-delà de la crête. Le théâtre des derniers combats donne l'image de la dévastation la plus complète : tous les arbres fauchés à quelques mètres du sol, un terrain de pierrailles tourné et retourné par  les obus, des débris d'armes et de vêtements , des blockaus allemands écrasés par nos obus, leur toiture de gros troncs broyées et émiettées . tel est actuellement ce bois le Prêtre que les soldats allemands ont baptisé "le bois de la mort, le bois des veuves.

Extrait de "La Guerre en Images vécue et racontée au jour le jour" Maison de la bonne presse PARIS

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